jeudi 28 juin 2007

Dailymotion et Matignon : liaisons dangereuses ?

Les mouvements récents au sein de l'équipe de Dailymotion, le plus populaire des réseaux sociaux français, ont fait couler beaucoup d'encre. Pourquoi tant d'agitation ? Tout simplement parce que Séverin Naudet, le directeur des contenus du site de partage de vidéos, rejoint le pôle communication du cabinet de François Fillon où il occupera le poste de conseiller technique chargé de la presse. Son poste chez Dailymotion est attribué à Martin Rogard, l'ancien chef du pôle multimédia au ministère de la Culture, proche de Renaud Donnedieu de Vabres.

Certains, à l'instar du journaliste du Figaro, voient dans cet échange de bons procédés une éventuelle étape dans la prise en compte de la netéconomie en France. En d'autres termes, ils voient d'un bon oeil l'intrusion "d'éléments politisés" au sein d'un des leaders mondiaux de la vidéo en ligne dans la mesure où cela montre que le pouvoir politique s'intéresse aux jeunes start-up du Net qui réussissent. Ensuite, et c'est là que le meilleur arrive : le lien de filiation de Martin Rogard est particulièrement intéressant. En effet,
Martin est le fils de Pascal Rogard, le directeur de la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques (SACD), connu pour son lobbying intensif dans le domaine du cinéma et du théâtre. Comme le rappelle à juste titre l'article de Ratiatum, "c'est souvent lui qui monte au créneau pour négocier durement des lois ou des accords avec ou contre ceux qui exploitent les oeuvres audiovisuelles".

Les mauvaises langues s'amuseront donc de la confrontation à venir entre père et fils lorsqu'il s'agira de négocier des accords pour Dailymotion, ou encore du malaise qui règnera lors de la refonte (si refonte il y a...) de la loi DADVSI et de la rediscussion du statut des intermédiaires techniques (FAI et hébergeurs), que l'actuelle ministre de la Culture, Christine Albanel, souhaite responsabiliser et associer à la lutte contre le piratage. Pour le moment, il est vrai que les sites comme Dailymotion ou Youtube s'abritent largement derrière leur statut d'hébergeur pour rejeter toute responsabilité quant aux contenus diffusés sur leurs plates-formes.

Au-delà de ces questions propices à la polémique et du rejet traditionnel de l'association entre politique et médias, il faut s'intéresser au fond des choses : le devenir de la rémunération des auteurs et artistes-interprètes pour la diffusion de leurs oeuvres ou interprétations sur Dailymotion. C'est là, selon nous, le principal intérêt du lien de filiation de Martin Rogard : on ne peut qu'espérer d'une part, qu'il négociera au mieux pour obtenir une rémunération adéquate aux créateurs des contenus au lieu de favoriser les diffuseurs, et d'autre part, qu'il favorisera la mise en place de filtres sur la plate-forme afin que des contenus protégés ne puissent plus être mis en ligne en l'absence de tout contrôle. Nous lui souhaitons donc toute la réussite qu'il mérite dans ses nouvelles fonctions !

mardi 26 juin 2007

De nouveaux supports visés par la rémunération pour copie privée

Depuis le vote de la loi DADVSI du 1er août 2006 qui a consacré les mesures techniques de protection des oeuvres et le test des trois étapes en droit français, plusieurs voix se sont élevées pour mettre en garde contre la réduction inquiétante du domaine de la copie privée et ses conséquences sur l'avenir de cette exception au monopole conféré par le droit d'auteur et les droits voisins. Le débat portant sur la nature de la copie privée - droit ou exception - semble désormais révolu : la copie privée est une simple exception et pas un droit reconnu aux consommateurs. Il n'en reste pas moins que le législateur doit s'assurer de l'application effective des exceptions au monopole, en ce qu'elles garantissent un équilibre souhaitable entre auteurs et consommateurs d'oeuvres de l'esprit.

Ainsi, a été créée au début du mois d'avril dernier l'Autorité de régulation des mesures techniques en vue d'assurer l'équilibre des intérêts entre consommateurs et titulaires de droits. Cette dernière aura pour principale mission de garantir le bénéfice de l'exception pour copie privée, et de veiller à l'interopérabilité des mesures techniques. Du fait de sa jeunesse, cette autorité n'a pas encore, du moins à notre connaissance, tranché des questions importantes ou pris des positions claires en faveur du maintien d'un certain niveau de copie privée pour les consommateurs. Elle a cependant le mérite d'exister.

Dans ce climat d'incertitude où la copie privée a de plus en plus de mal à faire face à la démultiplication des moyens de contrôle des titulaires de droits, producteurs en premier lieu, la Commission chargée de déterminer le niveau de rémunération des créateurs sur les supports vierges pour le manque à gagner subi du fait des copies privées de leurs oeuvres effectuées par les consommateurs (ce qu'on appelle la "taxe pour copie privée"), vient d'élargir le champ des appareils auxquels cette taxe est applicable. Créée avec la loi de 1985, cette rémunération visait tout d'abord les CD's et les cassettes VHS vierges, puis les DVD et même, depuis 2001, certains supports comme les lecteurs mp3. Jusqu'ici tout allait presque bien mais depuis quelques jours, la Commission a imposé
une nouvelle redevance sur les clés USB, les disques durs externes et les cartes mémoires. Et là les choses se gâtent...

Pourquoi ce regain de tension? Tout d'abord parce qu'il est difficilement soutenable de mener à la fois une lutte contre la copie privée en multipliant les moyens de la réduire à néant tout en élargissant l'assiette de sa rémunération. Ensuite, au-delà des divergences entre les membres de la Commission (titulaires de droits qui perçoivent la rémunération v. fournisseurs et consommateurs qui s'en acquittent - voir pour un exemple de cette divergence les interviews publiées sur LCI.fr ), une question de concurrence se pose de manière évidente : le niveau de la rémunération pour copie privée en France est un des plus élevés d'Europe et il est supporté par les fournisseurs, qui le reportent sur les consommateurs. Les distributeurs de supports vierges se retrouvent ainsi dans l'impossibilité de lutter contre les prix de vente imbattables pratiqués par des sites Internet situés dans des pays où la taxe pour copie privée est moins élevée. Pour couronner le tout, ces mêmes distributeurs ne sont pas invités à siéger à la Commission afin d'y faire valoir leurs arguments, ce qui renforce leur frustration.

Des solutions ?
Comme le propose Thierry Desurmont, vice-président du directoire de la SACEM, "il faudrait réfléchir à une rectification de la loi pour que ce ne soit pas les consommateurs mais les sites qui leur vendent des supports vierges qui paient la rémunération". Cette solution est sympathique en théorie mais difficile à mettre en pratique, le contrôle de tous les points de vente sur Internet étant particulièrement fastidieux. Par ailleurs, modifier la loi française ne serait, à notre avis, que d'une efficacité limitée, une harmonisation européenne des règles applicables étant beaucoup plus efficace, même si le problème des sites extra-communautaires se posera toujours. Ces pistes sont à explorer, espérons qu'elles le seront vraiment et que le législateur ne se contentera pas d'augmenter la taxe pour copie privée sans réellement prendre le temps d'analyser les conséquences d'un tel acte.


Les niveaux de rémunération fixés par la commission (source : LCI.fr)

Ces nouveaux prélèvements prendront effet lorsqu'ils seront publiés au Journal Officiel, a priori début juillet.

Clés USB

* 512 Mo : 15 centimes
* 1 Go : 23 centimes
* 2 Go : 36 centimes
* 10 Go : 1€30

Cartes mémoire

* 512 Mo : 7 centimes
* 1 Go : 9 centimes
* 2 Go : 18 centimes
* 10 Go : 62 centimes

Disques durs

* 80 Go : 4€77
* 160 Go : 6€44
* 320Go : 9€16
* 1000Go (1 téraoctet) : 20€

lundi 25 juin 2007

Semaine "Lull" sur Tracklaws

Doux mélange de deux voix complices et d’une guitare inspirée de musiques du monde, le style du groupe Lull est épuré et dégage une mélancolie joyeuse qui donne envie de partager leur univers. Originaires de Montpellier, les deux membres du groupe ont sorti un premier album intitulé "Duo acoustique", que nous vous présentons cette semaine.

Bonne écoute et bon début de semaine à tous.


vendredi 22 juin 2007

Revue de presse

Comme vous avez pu vous en rendre compte, cette semaine a été plutôt calme sur Tracklaws, du fait de l'emploi du temps plutôt chargé de son rédacteur. Parallèlement, ces derniers jours ont été l'occasion de réfléchir, avec notre ami Bertrand Pautrot, à l'éventualité d'une association entre Spiderlaws et Tracklaws afin de créer une page unique, à même d'offrir une vision plus complète du droit de la communication, des nouvelles technologies et de la propriété intellectuelle. Vous serez bien évidemment tenus au courant en temps voulu de l'évolution de ce projet.

En attendant le retour de l'actualité sur Tracklaws lundi prochain, nous vous proposons une sélection d'articles intéressants à lire pendant le week-end :

- Piraterie informatique massive en Italie : LCI.fr, Le Monde.fr ;

- L'affaire Koltès ou les limites du droit moral de l'auteur : Brèves de droit de la propriété intellectuelle et de droit de la Culture ;

- Chut ! Nouveau blog pour débattre de l'avenir de la musique : ZD Net ;

- Point sur les attaques judiciaires menées contre Youtube et Dailymotion : Journal du Net .

mercredi 20 juin 2007

Le Blackberry interdit dans les hautes sphères de l'Etat français

Le Blackberry est une merveille de technologie qui fait partie intégrante de la vie de plusieurs millions de personnes à travers le monde. Son atout principal, outre une ergonomie en constate évolution et des fonctions assez diversifiées, consiste dans la possibilité de recevoir directement ses mails, sous réserve de payer un forfait supplémentaire à son opérateur téléphonique. Moins économique qu'un PDA (assistant personnel) muni de la Wi-fi, il permet néanmoins de ne pas être dépendant des points d'émissions des ondes Wi-fi, mois développés que les antennes-relais GSM, et donc de rester joignable partout, tout le temps.

Doté de telles qualités, il a fait fureur chez les cadres, les dirigeants d'entreprises ou les avocats...mais aussi chez les politiciens, que l'on voit toujours collés à leur téléphone. Cependant, son utilisation a été interdite par une récente circulaire envoyée dans les cabinets ministériels, à l'Elysée et à Matignon, pour des raisons de sécurité des données. La raison de l'interdiction est simple : cet appareil est fabriqué par la société canadienne Research in Motion (RIM), et l'ensemble des données transite par deux serveurs situés aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. On voit déjà au loin le risque de se faire espionner par le gouvernement américain, par l'intermédiaire de la National Security Agency (NSA), qui pourrait intercepter des communications contenant des informations confidentielles. Selon M. Juillet, haut responsable de l'intelligence économique auprès du gouvernement français, "les risques d'interception sont réels, c'est la guerre économique".

Comme l'explique un article publié aujourd'hui dans Le Monde, la grogne monte chez les utilisateurs privés de leur jouet favori. Ces derniers, à qui le Blackberry fait gagner un temps considérable et permet de rester disponible pour leurs proches, en dépit d'horaires souvent contraignants, ne comprennent pas pourquoi d'hypothétiques risques d'espionnage auraient raison de leurs habitudes. Ils devraient néanmoins s'estimer heureux, on les prive de Blackberry avant qu'ils n'en soient complètement dépendants, comme c'est le cas de certains Américains...Un article du New York Times publié il y a quelques mois expliquait en effet que nombre d'utilisateurs faisaient des dépressions du fait d'une utilisation intempestive de leur Blackberry car ils ne parvenaient plus à faire la différence entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle, vivant alors dans un stress permanent. D'autres encore, se plaignaient de vives douleurs dans les articulations des doigts à force de manier la molette magique de leur appareil... Conclusion : en préservant la confidentialité des informations du gouvernement, il semble que l'on préserve également la santé de ses membres !

lundi 18 juin 2007

Semaine "Ehma" sur Tracklaws

Retour aux bonnes habitudes après une semaine sans présentation d'artiste sur Tracklaws. Dans la même veine que Robert Costlow, qui avait été mis en avant il y a quelques semaines sur nos pages, la musique d'Ehma s'inscrit dans le courant du minimalisme.

Emmanuel est né en Belgique, à Binche, en 1969. Déjà passionné de musique à la naissance, il sait qu'il sera technicien du son, l'avenir lui apprendra que non. Il découvre le piano en 1983. Jusqu'en 1988, ce n'est qu'une passion. A l'époque il se contente d'interpréter les oeuvres d'autres compositeurs comme Beethoven, Litz, Bach ou Satie. En 1997, après une déception sentimentale, il va composer sa première oeuvre issue d'une réflexion, d'une recherche et non plus d'une simple improvisation. C'est comme cela qu'est née « Mercredi 2 juillet 1997, 11 ans après ».

Il a depuis plusieurs albums à son actif, comme vous pourrez le découvrir en vous baladant sur son profil Jamendo. L'album mis en écoute ci-dessous, composé en 2003, est intitulé "La plage de Blâne-est".

Bonne écoute et bon début de semaine à tous.



vendredi 15 juin 2007

Politique et image : Internet impossible à contrôler ?

Il a souvent été reproché au nouveau président français, Nicolas Sarkozy, d'avoir un réseau de connaissances tentaculaire dans le milieu des médias, lui permettant d'exercer une certaine influence sur les contenus diffusés, que ce soit en termes d'informations ou de choix des images utilisées pour le présenter. Certains le considèrent même, non sans une pointe d'exagération il est vrai, comme un "Berlusconi à la française". Nous ne reviendrons pas ici sur les évènements intervenus durant la campagne, notamment l'affaire de Paris-Match ou les quelques déclarations menaçantes faites à des journalistes, mais sur une vidéo qui tourne sur Internet depuis une semaine et qui a déjà été vue plus d'un million de fois. Elle représente M. Sarkozy lors d'une conférence de presse au G8, à la sortie de son entrevue avec le président russe, Vladimir Poutine.



Au cours de cette conférence de presse, le président de la République, qui arrive en retard, n'est pas aussi vif qu'à son habitude, il se laisse aller à des sourires inexpliqués, a des mimiques étranges et semble même à un moment parler tout seul...en d'autres termes, il n'a pas tout à fait l'air d'être dans son état normal ! Ces images n'ont quasiment pas été montrées à la télévision française et, lorsque cela a été fait, les commentateurs ne se sont livrés à aucune insinuation quant à l'état du président. Eric Boever, le présentateur de la deuxième chaîne publique belge de la RTBF, a quant à lui introduit cette vidéo dans son JT en annonçant que le président "n'avait apparemment pas bu que de l'eau..." : polémique immédiate et arrivée de ladite vidéo sur Internet, fin annoncée du contrôle des images...

Deux jours plus tard, soit mardi dernier, le présentateur belge se rétracte et contacte l'ambassade de France à Bruxelles afin de présenter ses excuses, demandant expressément à ce que celles-ci soient relayées à qui de droit, "jusqu'à l'Elysée si nécessaire". C'est dire si la télévision, même étrangère, doit observer une certaine réserve lorsqu'elle parle d'un chef d'Etat, pour des raisons politiques évidentes. Mais que se passe-t-il, dans le même temps, sur la Toile ? La vidéo a été postée sur tous les sites de vidéos importants (comme YouTube ou Dailymotion) et a fait le tour du monde en un rien de temps. De plus, elle est souvent accompagnée de commentaires peu flatteurs, comme "Sarkozy ivre" ou encore "Sarkozy bourré au G8"... Les conseillers en communication sont alors dépassés par les évènements et ne peuvent, techniquement, supprimer la vidéo de tous les sites où elle est diffusée. L'entourage du président, interrogé sur ces images, s'est contenté de déclarer : "à l'Elysée, il n'est pas d'usage qu'on commente les plaisanteries de mauvais goût".

Cette mini polémique, si elle fait rire dans un premier temps (en tout cas lorsque l'on visionne la vidéo pour la première fois...), permet de réaliser l'impact d'Internet sur l'image des personnalités publiques qui y sont représentées. Quelle que soit la nature de son réseau de connaissances, personne n'est à l'abri sur la Toile, les sources à même de poster des contenus étant trop nombreuses et partant, incontrôlables. Il est vrai que cela présente un risque, en cas de détournement des images par exemple, d'atteinte à la vie privée ou de diffamation. Mais, en l'espèce, il n'y avait rien de tout cela et la vidéo (hors commentaires du présentateur belge), ne constitue qu'une information brute, dont Internet permet la diffusion massive alors que d'autres médias préfèrent garder le silence. Il semble qu'il faille donc composer avec un nouvel acteur dans la gestion de son image et ne pas s'arrêter aux médias traditionnels. Des riches héritières aux stars de la chanson, en passant par les hommes politiques, la fonction de personnalité publique devient décidemment de plus en plus difficile à gérer !

jeudi 14 juin 2007

Les représentants de l'industrie musicale reçus à l'Elysée

Selon un article paru aujourd'hui dans Les Echos, les représentants de l'industrie musicale rencontraient pour la première fois, ce matin à l'Elysée, les membres du cabinet du nouveau président de la République. Parmi ceux qui vont faire le déplacement, on trouve principalement des producteurs. Ces derniers seront représentés par le SNEP (Syndicat National de l'Edition Phonographique), l'UPFI (Union des Producteurs Phonographiques Français Indépendants), la SCPP (Société Civile des Producteurs de Phonogrammes) et la SPPF (Société des Producteurs de Phonogrammes en France). Du côté des sociétés de gestion collective, la présence de la SACEM est également prévue. Pour l'Elysée, cette prise de contact, qualifiée de "préparatoire", a pour principal objectif d'écouter les revendications de ces acteurs de l'industrie musicale afin de proposer ensuite des solutions plus adaptées - tout dépend bien sûr de quel côté on se place - aux enjeux actuels.

Comme le rappelle Les Echos, et cela avait d'ailleurs fait l'objet de développements sur Tracklaws à l'époque, Nicolas Sarkozy a clairement affiché pendant la campagne électorale son souhait de défendre avec vigueur les droits d'auteur, et son opposition ferme à la licence globale. Avec une telle vision, que reste-t-il si ce n'est la voie de la répression pour lutter contre le téléchargement sur Internet ? Il semble que les producteurs l'aient bien compris et qu'ils aient choisi d'exploiter au mieux cette nouvelle tendance répressive. Tout d'abord, le récent arrêt du Conseil d'Etat, en censurant la position de la CNIL, leur a ouvert la voie pour la constitution de fichiers de contrefacteurs. Ensuite, la nouvelle ministre de la Culture, Christine Albanel, a rappelé lors du Festival de Cannes l'intérêt de la riposte graduée en termes de lutte contre la piraterie numérique, comme l'avait déjà fait plus insidieusement la première circulaire d'application de la loi DADVSI du 1er août 2006, émise en janvier 2007. Fichiers de contrefacteurs et riposte graduée, lutte contre la piraterie main dans la main avec les fournisseurs d'accès et mesures d'information et de sensibilisation des internautes...on aurait pu penser que la coordination de ces moyens aurait été suffisante pour les producteurs. Mais cela ne semble pas être le cas : ces derniers veulent désormais mettre en place des "radars automatiques" sur la Toile afin d'automatiser les amendes en cas de téléchargements illicites. On peut parfois se demander ce qui leur passe par la tête... La prochaine étape est-elle la mise en place de "peines plancher" pour les récidivistes du téléchargement !?

Au milieu de cette "folie répressive", il faut espérer que d'autres questions seront soulevées au cours de cette entrevue et que les débats ne s'arrêteront pas à la mise en place de nouveaux outils de sanction. Les imperfections de la loi DADVSI sont nombreuses et ne se limitent pas au traitement du téléchargement ou aux DRM. On oublie malheureusement trop souvent les intérêts des auteurs et des artistes-interprètes pour se focaliser sur ceux des producteurs, partant de l'idée que sans eux, il n'y aurait plus de musique, alors que cela est de moins en moins vrai. D'autres problèmes n'ont pas trouvé de solution avec la nouvelle loi, et notamment celui de la rémunération équitable de l'article L.214-1 du Code de la propriété intellectuelle, ses modalités de répartition et la place qu'elle doit occuper par rapport au droit exclusif des artistes-interprètes. Si on doit remanier la loi DADVSI, alors il faudra le faire de manière substantielle, et non seulement sur les quelques points pour lesquels le lobbying aura été le plus important.

Dans un autre registre, il y a aussi la question de la "TVA sociale" : cette nouvelle taxe destinée à financer les nombreuses mesures voulues par le nouveau gouvernement sera-t-elle appliquée aux produits culturels ? Le SNEP a déjà tenté, il y a quelques années, d'obtenir la TVA à 5.5% sur le disque. Sans succès, celle-ci est restée à 19.6%. Va-t-elle atteindre un niveau supérieur prochainement ? Le prix du disque, déjà jugé trop élevé par les consommateurs, va-t-il encore augmenter ? Il serait en effet intéressant de se poser également ce genre de questions car le prix de vente des supports fait autant partie des raisons de l'effondrement du marché que le téléchargement, contrairement à ce que peuvent penser certains. Affaire à suivre donc...

mercredi 13 juin 2007

La SPPF à l'assaut des sites de P2P américains...

La société civile des producteurs de phonogrammes (SPPF) a assigné les trois principaux éditeurs américains de logiciels de P2P - Azureus, Morpheus, Shareaza - devant le tribunal de grande instance de Paris sur le fondement de la loi DADVSI du 1er aout 2006. L'article 21 de cette loi a créé un nouvel article L.335-2-1 dans le Code de la propriété intellectuelle (CPI), qui prévoit une peine de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende pour le fait "d'éditer, de mettre à disposition du public, ou de communiquer au public, sciemment et sous quelque forme que ce soit, un logiciel manifestement destiné à la mise à la disposition du public non autorisée d'oeuvres ou d'objets protégés". L'action menée par la SPPF vise à lutter contre la piraterie exercée sur le territoire français et à demander réparation des préjudices subis par la mise à disposition non autorisée des titres appartenant à son catalogue. Selon une enquête menée par la société Advestigo, mandatée par la SPPF, c'est environ 475 000 titres qui seraient mis à disposition illégalement sur les réseaux.

Les producteurs de musique indépendants, majoritaires au sein de la SPPF, semblent donc avoir changé de cible dans leur lutte contre la piraterie numérique en passant des attaques inutiles contre des internautes aux moyens financiers limités - que le nouveau gouvernement semble d'ailleurs décidé à traiter avec clémence (avec le retour annoncé de la riposte graduée) - à des attaques contre des acteurs biens plus riches, à savoir les principaux éditeurs de logiciels de P2P. Ce pragmatisme a fait sensation au sein de l'industrie musicale puisque c'est la première fois que des producteurs français attaquent des sites américains.

Deux difficultés apparaissent cependant : tout d'abord, il va falloir prouver que les éditeurs incriminés entrent bien dans le champ d'application de l'article L.335-2-1 en établissant que le logiciel qu'ils éditent est "manifestement destiné à la mise à disposition du public non autorisée d'oeuvres ou d'objets protégés". Les logiciels de P2P actuels n'ont rien à voir avec leur ancêtre Napster et leur organisation totalement décentralisée rendra la preuve de l'abus plus difficile. Ensuite, si jamais le tribunal de grande instance faisait droit à la demande de la SPPF, cette dernière devrait ensuite obtenir l'exequatur de la décision française sur le territoire américain.

Mais si le combat n'est pas encore gagné, il est certain qu'il vaut la peine de le mener. Attaquer les éditeurs de logiciels présente le double avantage de traiter le problème à la source et non d'essayer de combattre ses conséquences en s'en prenant aux consommateurs, préservant ainsi l'image du droit d'auteur chez ces derniers et ce, même si celle-ci a été largement ternie depuis quelques années. Ensuite, l'intérêt financier n'est pas négligeable. Il suffit pour s'en convaincre de se remémorer l'affaire qui a opposé l'éditeur du logiciel Kazaa à la RIAA, le syndicat représentant les intérêts des producteurs de phonogrammes américains, en 2004. Les maisons de disques s'étaient partagé à l'époque plus de 100 millions d'euros à l'issue du verdict condamnant Kazaa. La somme demandée par la SPPF n'atteint pas ces sommets, il semblerait qu'elle tourne autour de 20 millions d'euros. Cependant, cela remplirait déjà quelque peu les caisses de ses membres, ce qui serait bienvenu à une époque où les rentrées d'argent sont en baisse constante...

mardi 12 juin 2007

Etude du DEPS : "Tendances de l'emploi dans le spectacle"

Pour notre plus grand plaisir, le Département des études, de la prospective et des statistiques (DEPS) du Ministère de la culture, dématérialise une partie de ses publications et met à la disposition du public les données statistiques issues de ses travaux. Quatre nouvelles collections sont téléchargeables sur le site du DEPS : Culture chiffres, Cultures prospective, Culture études et Culture méthodes. Nous avons décidé aujourd'hui de vous présenter le premier numéro de Culture chiffres, qui offre, sous la direction d'Eric Cléron et de Frédérique Patureau, une synthèse actualisée de travaux menés depuis 2003 par la commission Emploi du Conseil national des professions du spectacle, et qui s'intitule 'Tendances de l'emploi dans le spectacle".

Selon ce document, le nombre de professionnels de l'audiovisuel et du spectacle a augmenté de 56% entre 1995 et 2004 : ils étaient 87 000 en 1995 et 135 000 en 2004. Ces professionnels se distinguent ainsi des autres catégories d'actifs puisque leur nombre a augmenté trois fois plus que celui des professions culturelles et quatre fois plus que l'ensemble des actifs, toutes professions confondues. C'est l'emploi intermittent qui porte cette croissance globale, le nombre d'artistes et de techniciens intermittents ayant été en moyenne multiplié par 3,4 entre 1986 et 2003. Parmi les artistes intermittents, ce sont les musiciens qui ont connu la plus forte progression, leur nombre ayant été multiplié par 4,7 sur la même période (5 300 en 1986, ils étaient 25 300 en 2005).

Mais attention, cette forte croissance ne signifie pas pour autant une croissance corrélative de l'emploi permanent. En effet, l'évolution des effectifs salariés dans la catégorie des professionnels de l'audiovisuel et du spectacle se caractérise par une érosion de la part du CDI par rapport à celle du CDI (59% des salariés étaient en CDI en 1998 contre 48% seulement en 2004). Parallèlement, la différence entre la croissance des actifs et la croissance des offres d'emploi (appelé "effet ciseaux" dans l'étude) sur la même période a eu une conséquence fâcheuse pour les intermittents : en moyenne, diminution du volume annuel moyen de travail de 33% et diminution du volume annuel moyen de rémunération de 26%.

Sur la base de ce constat, l'étude rappelle la mise en place, depuis le 1er janvier 2005, d'un Fonds transitoire financé par l'Etat pour assurer l'indemnisation des intermittents n'ayant pas totalisé 507 heures de travail sur une période de dix mois (et qui ne relèvent donc pas des annexes VIII et X du règlement général de l'Assurance chômage) mais les ayant atteint sur une période de douze mois. Pour rappel, les allocataires des allocations visées aux Annexes VIII (techniciens) et X (artistes) étaient 25 000 en 1991 et environ 100 000 en 2005, avec un déficit annoncé de 800 millions d'euros.

Les nouvelles dispositions concernant les Annexes VIII et X, effectives depuis le 1er avril 2007, mettent en place un système d’indemnisation qui fait appel à une triple solidarité :

- la solidarité interprofessionnelle avec le maintien des Annexes VIII et X de l’Assurance chômage,
- la solidarité nationale avec la mise en place d’un Fonds de professionnalisation et de solidarité financé par l’Etat,
- la solidarité professionnelle dans le cadre des négociations collectives.

Enfin, l'étude rappelle que le nombre d'entreprises du secteur du spectacle a progressé à un rythme soutenu (environ 42% entre 1996 et 2003), particulièrement dans le spectacle vivant (+ 54% sur la même période).


Tendances de l'emploi dans le spectacle" [Pdf - 4 pages]

lundi 11 juin 2007

Suite et fin de l'affaire monputeaux.com

Les blogs, qui servent principalement à exprimer des idées, voire même des critiques, et qui constituent de plus en plus une alternative intéressante au journalisme traditionnel, sont parfois également au centre de combats judiciaires acharnés. C'est typiquement le cas de monputeaux.com, le blog de Christophe Grébert. Le marathon judiciaire l'opposant à la famille Ceccaldi-Raynaud n'a pris fin que la semaine dernière, après trois ans de procédure. Pour rappel, les Ceccaldi-Raynaud sont à la tête de la mairie de Puteaux de père en fille depuis 1969. Monputeaux.com est, comme son nom l'indique, un blog qui traite de la ville de Puteaux mais aussi et surtout, de sa politique municipale. Sur la page d'accueil du blog, Christophe Grébert, militant socialiste, se décrit comme un "Putéolien qui a décidé de l'ouvrir", et il le fait...bien évidemment, cela ne plaît pas à tout le monde, en particulier à la maire UMP et à son père !

Tout commence en 2004 lorsque M. Grébert rencontre le maire pendant l'une de ses ballades en ville et que ce dernier ordonne à des agents municipaux qui l'accompagnent d'interpeller le blogueur. Ne se laissant pas faire, M. Grébert interpelle plusieurs passants qui vont prévenir la police nationale. Celle-ci va intervenir et libérer le blogueur des mains des agents municipaux : premier revers pour le maire qui va être obligé de s'expliquer sur cette interpellation douteuse. Une lettre va alors être publiée quelques jours plus tard par la mairie pour expliquer que le contrôle de la police municipale avait pour objet de vérifier l'appareil photographique de M. Grébert, qui "possède la fâcheuse habitude de photographier les enfants et de les approcher sans autorisation des parents". Outré pas de telles insinuations - "on insinue que je suis pédophile" déclarera l'intéressé au moment de la publication de la lettre litigieuse - M. Grébert porte plainte pour diffamation et complicité contre le père et la fille Ceccaldi-Raynaud. Il obtient leur condamnation et le 26 avril 2006, la Cour d'appel de Versailles confirme la condamnation en première instance : les deux protagonistes devront payer 2500 euros d'amende chacun et régler solidairement 3000 euros de dommages-intérêts. Ils se sont depuis pourvus en cassation contre cet arrêt.

Mais les choses ne se sont pas arrêtées là. La même année, les services de la maire assignent C. Grébert pour avoir repris sur son blog un article "diffamant" publié par le quotidien Le Parisien, relatif au licenciement d'une employée de la mairie après qu'elle eut fait part à ses supérieurs de ses soupçons concernant des irrégularités dans l'attribution d'un marché public. La 17e chambre correctionnelle de Paris prononcera la relaxe du blogueur au motif que "le prévenu dirigeant le site litigieux à titre purement privé et bénévole n'était pas tenu de se livrer à une enquête complète et la plus objective possible sur les faits qu'il évoquait". La mairie fera appel de cette décision. Mercredi 6 juin dernier, la 11e chambre de la Cour d'appel de Paris a confirmé la décision des juges de première instance, relaxant alors M. Grébert et son coprévenu, Le Parisien. Belle victoire pour le blogueur, qui déclarait mercredi à la sortie du tribunal "cela fait 4-0 pour moi contre les Ceccaldi-Raynaud". Et d'ajouter "cette décision prouve ce que je répète depuis trois ans. La mairie de Puteaux ne cesse d'instrumentaliser la justice pour faire taire ceux qui la gênent".

Fort de cette victoire judiciaire, M. Grébert a décidé de se lancer dans la politique et d'aller désormais combattre le maire et sa fille sur le terrain électoral. Il a créé un nouveau blog, puteaux.org, dans lequel il compte ouvrir un espace de dialogue avec les habitants de Puteaux afin de collecter le maximum d'opinions et de proposer un projet pour les prochaines élections municipales en 2008. Le message apparaissant en première page du blog est d'ailleurs clair : "Ensemble, changeons Puteaux en mars 2008 - Un projet municipal construit par les Putéoliens". En tant que blogueur, nous nous félicitons du triomphe de la liberté d'expression et du droit à l'information du public dans ces différents affaires et nous souhaitons à M. Grébert la plus grande réussite possible dans ses projets politiques face à une maire sortante dont l'image n'a pu être que ternie par les évènements récents.

mardi 5 juin 2007

Tracklaws revient vendredi

Pas d'actualité ces trois prochains jours en raison de notre départ à Montpellier pour la conférence organisée par l'ERCIM mercredi 6 et jeudi 7 à la faculté de droit. Le thème des deux journées de débat est le suivant : "Quels droits pour les artistes du spectacle ?".

Programme du colloque [Pdf].

En attendant, quelques liens intéressants :

1. Apple Itunes Plus : les fichiers vendus sur Itunes sans DRM contiennent des données personnelles relatives à la personne qui les a téléchargés. (article de LCI.fr, article de ZDNet).

2. Rapport Cédras sur le téléchargement illicite d'oeuvres protégées par le droit d'auteur (avril 2007).

3. "Nos 10 vérités qui dérangent l'industrie du disque" (Ratiatum.com)

lundi 4 juin 2007

Coup de coeur Tracklaws pour Bobby Jay !

Au cours de notre revue quotidienne de l'actualité des nouvelles technologies et de la musique, une vidéo mise en ligne sur Musique 2.0, le blog de Borey Sok, nous a fait sourire. Elle nous présente Bobby Jay, un rappeur de 5 ans qui, malgré son jeune âge, n'a rien à envier à ses idoles. A vous de juger...


Semaine "Just Jack" sur Tracklaws

Jack Allsopp a.k.a Just Jack, est un compositeur britannique de trip-hop qui a grandi dans le quartier de Camden, à Londres. Après avoir arrêté ses études pour se consacrer à la musique, il va faire des petits boulots pour gagner un peu d'argent, et continuer de peaufiner ses productions dans sa chambre arrangée en mini studio.

Après avoir été repéré par RG Records, un label londonien, Just Jack va accèder à la notoriété dans le milieu du trip-hop anglais, puis mondial. RG produira son premier album en 2003, "The Outer Maker". Son deuxième opus "Overtones", sorti début 2007, a été produit par Mercury suite au dépôt de bilan de RG. Mélange de toutes sortes d'influences différentes, sa musique à la sonorité très british nous a conquis. En voici deux extraits, tous deux tirés du dernier album.

Writer's block :
Disco friends :

Bonne écoute et bon début de semaine à tous

vendredi 1 juin 2007

Sommet du droit d'auteur de la CISAC : vers la réinvention des modèles économiques ?

Les 30 et 31 mai, a eu lieu à Bruxelles le premier sommet consacré au droit d'auteur, à l'initiative de la CISAC (Confédération internationale des sociétés d'auteurs et de compositeurs), qui regroupe 217 sociétés d'auteurs, présentes dans 114 pays. Ce sommet avait pour objectif, outre la réunion de ses membres en vue d'une concertation sur l'avenir de l'exploitation de leurs droits, de permettre le dialogue entre les titulaires de droits, les auteurs et les géants des télécommunications ou de l'Internet (comme British Telecom, Google, Yahoo...). C'est une très bonne chose dans la mesure les créateurs ont, de manière croissante, l'impression d'être lésés par l'orientation du marché vers les fournisseurs de contenants, au détriment des contenus qui y circulent, alors que ces mêmes fournisseurs de contenants se plaignent de l'inaction des fournisseurs de contenus et de leur crainte omniprésente du piratage, qu'ils considèrent comme des entraves au développement du marché et à la recherche de nouveaux modèles économiques viables.

Tous se sont accordés sur l'idée que les oeuvres et leurs auteurs devaient occuper une place prépondérante dans la "chaîne de valeur". Mais cette affirmation trouve sa limite dans la mise en place d'un système qui mettrait de manière effective les auteurs au premier plan. Comme l'a déclaré le premier jour du sommet Ben Verwaayen, le directeur de British Telecom, en s'adressant aux titulaires de droits, "la technologie n'est pas le problème, le changement profond c'est le monde qui vous entoure". Et d'ajouter, non sans une pointe de provocation, "vous devez trouver une solution à votre problème, car si vous pensez que quelqu'un d'autre le résoudra, vous vous trompez lourdement". Le décor était planté...même s'il faut prendre avec mesure les déclarations d'un représentant de l'industrie des télécommunications. Ces acteurs ont une vision strictement économique, bien loin du souci de protection des auteurs. Donc pour les leçons de morale, il faudra repasser. Cependant, nous sommes en partie d'accord avec ce constat, dans la mesure où il met en exergue le fait que le droit d'auteur peut tout à fait être respecté sur Internet mais que, pour ce faire, il va devoir s'adapter à de nouvelles réalités économiques et sociales. Il faut donc tourner la tête vers l'avenir plutôt que de se réfugier constamment dans le passé.

C'est en substance ce qu'a reconnu Nicholas Motsatse, directeur-général de la société sud-africaine de gestion collective (SAMRO), en déclarant "qu'une des faiblesses de l'industrie est d'avoir lutté contre le développement des nouvelles technologies". Il ajoute qu'au contraire, les représentants de cette industrie "auraient dû être les premiers [à se lancer dans l'aventure]". Nous martelons constamment cette idée sur Tracklaws selon laquelle il eut en effet été préférable que les titulaires de droits prennent des initiatives sur la Toile au lieu de contempler les autres le faire à leur place, pour se plaindre ensuite d'être mis de côté. Cela a une autre conséquence négative sur l'image des auteurs, à qui l'on reproche de plus en plus de "brider la liberté des internautes" alors même que les vrais responsables sont les producteurs et éditeurs. Ce sont ces derniers qui vont devoir bouleverser leurs habitudes et mettre en place de nouvelles solutions, les auteurs leur ayant cédé leurs droits ne pouvant plus décider de l'exploitation de leurs oeuvres. Ils perdent ainsi une grande partie de leurs prérogatives sur leurs oeuvres et subissent les choix de leurs cessionnaires.

Au vu de ce qui précède, nous ne craignons pas que le droit d'auteur soit voué à une mort prochaine sur Internet. Mais il est clair que sa survie dépendra en grande partie de sa faculté d'adaptation, contrairement à ce que peuvent penser certains. Les années à venir, qui vont voir, selon Ben Verwaayen, "la fin du modèle économique qui prévalait depuis cent ans", ne constituent pas pour autant la fin annoncée du droit d'auteur. Nous pensons qu'aujourd'hui, l'inaction de certains producteurs et éditeurs ainsi que leur combat acharné pour maintenir le statu quo, sont bien plus dangereux pour le respect du droit d'auteur et l'avenir de la musique sur Internet que le développement des technologies. De nouvelles possibilités vont voir le jour et on peut déjà se demander dans quelle mesure les auteurs ne vont pas être à même d'exploiter leurs oeuvres seuls dans les années à venir. Les exploitants d'aujourd'hui ont alors tout intérêt à trouver leur place maintenant, avant que la transition n'ait été totalement réalisée et que les auteurs aient pris conscience qu'ils n'avait plus besoin d'eux...